L’homme actuel est un composé ternaire des trois substances qui sont, l’esprit immortel, qui est son être essentiel, l’âme passive avec son instinct, et le corps matériel qu’elle anime […] dans l’homme lorsque le principe vital qui anime son corps matériel a terminé selon les lois de la nature […] il s’échappe et va se réintégrer dans la masse générale d’où il était provenu… »

Jean-Baptiste Willermoz ne s’en tient pas dans sa définition de la créature, à une composition duelle ou « binaire » de l’homme, qui ne serait doté que de deux uniques substances, soit le « corps » et « l’âme », mais soutient sans ambigüité une composante ternaire de l’homme, constitué d’un « corps matériel » (corpus), d’une « âme animale » (anima), et d’un « esprit divin » (spiritus) [1].

La claire formulation de cette thèse portant sur le composé « ternaire » de l’homme depuis le péché originel, apparaît sans voile dans le neuvième cahier doctrinal en des termes on ne peut plus limpides comme il est aisé de le constater : « L’homme actuel est donc un composé ternaire des trois substances qui sont, l’esprit immortel, qui est son être essentiel, l’âme passive avec son instinct, et le corps matériel qu’elle anime […] dans l’homme lorsque le principe vital qui anime son corps matériel a terminé selon les lois de la nature […]  il s’échappe et va se réintégrer dans la masse générale d’où il était provenu ; dès lors l’esprit qui n’avait été uni que forcément au corps matériel par ce principe vital, devenu libre, monte ou descend dans la sphère qu’il a choisie pendant son union par ses sentiments et ses actes habituels, et le cadavre reste livré à la dissolution par la séparation des principes élémentaires qui vont se réintégrer dans leur source primitive… [2]

La composition tripartite « corps », « âme », esprit » semble d’ailleurs si évidente à Jean-Baptiste Willermoz, qu’il s’étonne qu’elle puisse représenter une difficulté pour des chrétiens ; que cette conception soit rejetée et niée par les matérialistes est une chose qui peut, éventuellement, se comprendre, mais de la part d’hommes nourris de l’enseignement de l’Évangile, connaissant les bases de leur religion, il y a là un problème que ne parvient pas à expliquer le fondateur du Régime rectifié, qui se demande en termes assez forts – en appelant à la méditation de cette question par les « vrais amis de la Sagesse » -, pourquoi donc certains s’obstinent à tenir un autre langage que celui de saint Paul dans son épître adressée aux Thessaloniciens, qui ne permet, il faut bien en convenir, aucune contestation possible.

Jean-Baptiste écrit : « Mais comment peut-il se faire, que sur une matière qui est de la plus haute importance, dont les bases reposent sur des principes évidents qui sont généralement reconnus, il règne encore aujourd’hui parmi des chrétiens une discordance et des obscurité soutenues de tant de subtilités qui ne peuvent que l’embrouiller davantage […] St Paul dit formellement dans sa 1ère épître aux Thessaloniciens Chap. Ve vers 23 : ‘‘Que le Dieu de paix vous donne une sainteté parfaite, afin que tout ce qui est en vous : l’esprit, l’âme et le corps, se conserve sans tache pour l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ’’. Voilà bien les trois substances distinctes que nous reconnaissons dans l’homme. Pourquoi donc s’obstiner à tenir un autre langage que celui de ce grand Apôtre, pour en préférer une plus humaine que la seule habitude a consacré, plus contentieux et chargé de tant d’obscurité. Nous livrons ces réflexions à la méditation des vrais amis de la Sagesse [3]. »

Le Phénix Renaissant, « L’immortalité de l’âme, son ‘‘émanation’’ et sa ‘‘réintégration’’ selon le Régime Écossais Rectifié », n° 7, 2021, pp. 148-152.

Notes.

[1] Il est à noter que cette question de la composition tripartite de l’homme, fit l’objet d’un débat contradictoire lors du Convent de Wilhelmsbad, ce que rapportent, quoique en termes discrets, les « Actes » officiels, dans lesquels on peut lire, dans un paragraphe intitulé « Connaissance & science : définition ; comment les chercher ? », qui fit d’ailleurs ensuite vivement réagir le Frère Jean-Louis Beyerlé (1738-1805), eq.  a Fascia : « […] l’homme est un composé ternaire d’esprit, d’âme & de corps » (Cf. Préavis du Fr. ab Eremo, Gr. Chancelier de la II°, Convent de Wilhelmsbad, le 29 juillet 1782).

[2] J.-B. Willermoz, 9ème Cahier. « Explications préliminaires servant d’introduction aux chapitres suivants qui contiennent la description des faits spirituels concernant la création de l’univers physique, temporel, et de ses parties principales, de la création de l’homme et de la femme, de leur prévarication et châtiment et des faits principaux survenus dans leur postérité jusqu’à l’époque du déluge universel ».

[3] Ibid.