« La « Lumière » authentique est perçue comme « ténèbres » par les hommes, et la fausse lumière des hommes, illusoire et trompeuse, est regardée comme nuit aux yeux de Dieu. »

L’injonction que ne cesse de rappeler la « Règle Maçonnique », appelant à la certitude renouvelée constamment du caractère surnaturel et immortel de « l’âme » est donc la suivante :

« Souviens-toi sans cesse » !

Le problème, sachant que tout ici-bas est “ inversé ”, constituant une “ réflexion ” totale du monde spirituel [1], la « Lumière » authentique est  ainsi perçue comme « ténèbres » par les hommes, et la fausse lumière des hommes, illusoire et trompeuse, est regardée comme nuit aux yeux de Dieu.

C’est ce qui explique pourquoi la “ Lumière invisible ” du Père fut appelée par les saints contemplatifs la « Divine Ténèbre » [2], nom donné à la plus haute « Transcendance » non-manifestée, celle que l’esprit n’est pas en mesure de concevoir et les sens capables de percevoir de par leur imperfection native, « Transcendance » de Dieu qui est une « nuit » pour l’esprit et une « nuit » pour les sens, « Transcendance » qui réside dans la plus “ épaisse obscurité ” par rapport au monde visible qui n’est, proprement, que l’ombre de l’authentique “ Réalité ”, mais qui, en vérité, est pure « Lumière » pour l’âme, faisant que de même que la véritable action est “ non-agir ”, que le silence possède en potentialité tous les sons, la “ Ténèbre supérieure ” est fondamentalement la « Lumière » qui surpasse toute lumière, l’essence principielle de la « Lumière suressentielle » [3].

Le caractère délicat de cette interrogation réside dans le fait que le terme “ ténèbres ”, au pluriel, dont l’acception courante de nuit, d’obscurité et de noire opacité semble évidente, possède une contrepartie, bien moins connue, mais pourtant largement utilisée par de nombreux auteurs spirituels, qui se laisse découvrir sous le nom de la “ Ténèbre ”, au singulier, nom provenant du discours théologique s’appliquant à la Divinité en son mystère inaccessible et ineffable.

Le Phénix Renaissant, « La “réintégration” des êtres dans leur ‘‘ressemblance’’ divine, selon le Régime Écossais Rectifié », n° 9, 2024, p. 67-69.

Notes.

[1]Aujourd’hui nous voyons au moyen d’un miroir, d’une manière obscure, mais alors nous verrons face à face ; aujourd’hui je connais en partie, mais alors je connaîtrai comme j’ai été connu. ” (I Corinthiens XIII, 12).

[2] En France, en plein XVIIe siècle et à une époque où la connaissance et la lecture des Pères grecs étaient encore peu développées, on retiendra qu’un pieux aveugle, à Marseille, François Malaval (1627-1719), profondément versé dans la pratique constante de l’oraison silencieuse intérieure, parla, de manière extraordinairement subtile, de la contemplation de la “ Belle Ténèbre ” pour signifier l’élévation de l’âme vers Dieu dans la lumière de la “ foi obscure ” et la “ docte ignorance ”.

[3] De nombreux textes des Pères de l’Église, évoquant la notion de “ Ténèbre ”, témoignent en des formulations magnifiques, du caractère singulièrement inaccessible et ineffable de la « Transcendance » divine.