La similarité doctrinale entre Origène et Martinès de Pasqually est, notamment sur la question de la destination spirituelle des âmes, c’est-à-dire leur réintégration à l’intérieur du Principe, absolument remarquable comme il est aisé d’en juger : « […] tout être corporel se réintégrera dans son premier principe d’émanation par le même nombre qui l’a produit… » (Traité, § 100) ; « La même faculté divine qui a tout produit, rappellera tout à son principe et, de même que toute espèce de forme a pris principe, de même elle se dissipera et se réintégrera dans son premier lieu d’émanation… » (Traité, § 116).

Comment s’opèrera cette « réintégration » ?

Tout simplement par une dissolution définitive des essences corporelles terrestres, laissant l’âme enfin libre de retourner à son premier état d’origine : « L’homme au contraire s’écarte journellement des lois spirituelles qu’il a en lui, aussi ne peut-il espérer sa réconciliation qu’après un long et pénible travail et la réintégration de sa forme corporelle ne s’opérera que par le moyen d’une putréfaction inconcevable aux mortels. C’est cette putréfaction qui dégrade et efface entièrement la figure corporelle de l’homme et fait anéantir ce misérable corps, de même que le soleil fait disparaître le jour de cette surface terrestre, lorsqu’il la prive de sa lumière. » (Traité, § 110).

Jean-Baptiste Willermoz, utilisant l’image de la Résurrection du Christ abandonnant son corps terrestre dans le sépulcre à Jérusalem, soutient exactement la même proposition en parlant d’un anéantissement de la forme corporelle matérielle, critiquant au passage ceux qui, « attachés exclusivement au sens littéral des traditions religieuses », sont incapables de comprendre le mystère spirituel de la « réintégration » : « Quelle est donc la nature de cette nouvelle forme corporelle [celle du Christ après la Résurrection], et qu’est-ce qui constitue la différence essentielle de celle-ci sur la première ? [C’est ce que] demanderont ces hommes charnels et matériels qui ne voient rien que par les yeux de la matière, et ceux qui sont assez malheureux pour nier la spiritualité de leur être, et ceux aussi qui, attachés exclusivement au sens littéral des traditions religieuses, ne veulent voir dans la forme corporelle de l’homme primitif avant sa chute, qu’un corps de matière comme celui dont il est actuellement revêtu, en y reconnaissant seulement une matière plus épurée. C’est Jésus-Christ lui-même qui va leur prouver la différence essentielle de ces deux formes corporelles et leur destination, en se revêtant de l’une après sa résurrection, après avoir anéanti l’autre dans le tombeau [1]. »

Le Phénix Renaissant, « L’immortalité de l’âme, son ‘‘émanation’’ et sa ‘‘réintégration’’ selon le Régime Écossais Rectifié », n° 7, 2021, pp. 164-166.

Note.

[1] J.-B. Willermoz, Le Traité des deux natures, MS 5940 n°5, Bibliothèque de Lyon.