« L’air n’étant point matière, on ne peut le regarder comme élément […] il n’est préposé que pour communiquer aux êtres corporels les forces et les vertus de ce Feu qui les a produits. Il est le char de la vie des éléments, et ce n’est que par son secours qu’ils peuvent recevoir le soutien de leur existence […]. »
« L’air » qui possède un lien direct avec « l’âme », n’est pas considéré comme étant un élément par le Régime Écossais Rectifié, ce qui étonne de nombreux membres de l’Ordre qui n’en comprennent pas la raison.
Or « l’air », qui est le « principe de vie », la manifestation de « l’Esprit-Saint » selon la conception spirituelle de l’âme « insufflée » dans le corps de l’homme, ne peut figurer au titre des « éléments » car sa nature n’est pas « matérielle », « l’air » représente le principe d’émanation de Dieu, c’est en quelque sorte une expression de sa « Parole », la forme invisible de son « Esprit-Créateur » que traduit la formule « Dieu dit » [1].
Louis-Claude de Saint-Martin (1753-1803), expose pourquoi « l’air » n’est pas un élément dans son premier ouvrage publié : « L’Air, en un mot, est absolument nécessaire pour l’entretien et la vie de tous les temps élémentaires, il ne subsistera pas plus longtemps qu’eux ; mais n’étant point matière, comme eux, on ne peut le regarder comme élément, et par conséquent, il est vrai de dire qu’il ne peut entrer dans la composition de ces mêmes corps. Quelle sera donc sa destination dans la Nature ? Nous ne craindrons pas de dire qu’il n’est préposé que pour communiquer aux êtres corporels les forces et les vertus de ce Feu qui les a produits. Il est le char de la vie des éléments, et ce n’est que par son secours qu’ils peuvent recevoir le soutien de leur existence ; car sans lui toutes les circonférences rentreraient dans le centre d’où elles sont sorties. Mais en même temps qu’il coopère le plus à l’entretien des corps, il faut remarquer qu’il est aussi l’agent principal de leur destruction, et cette Loi universelle de la Nature ne doit plus nous étonner, puisque la double action qui constitue l’Univers corporel, nous apprend qu’une de ces actions ne peut jamais y dominer qu’au détriment de l’autre […] [2]. »
Ainsi « l’air », tout en étant parallèlement la force la plus puissante de soutien dans l’existence des autres éléments qui sans lui ne serait point capables de subsister dans « l’être », peut également devenir le principe actif de leur destruction et dissolution, démontrant que son « opération » est d’un autre ordre, un ordre participant d’une autre « classe » ou région différente, de par sa nature invisible et transparente, dont est faite l’immensité de l’espace, infiniment supérieur à la « terre », au « feu » et à « l’eau » [3].
Le Phénix Renaissant, « L’immortalité de l’âme, son ‘‘émanation’’ et sa ‘‘réintégration’’ selon le Régime Écossais Rectifié », n° 7, 2021, pp. 38-39.
Notes.
[1] « Au commencement Dieu créa le ciel et la terre. La terre était informe et toute nue ; les ténèbres couvraient la face de l’abîme ; et l’Esprit de Dieu était porté sur les eaux. Or Dieu dit : ‘‘Que la lumière soit faite’’. Et la lumière fut faite. Dieu vit que la lumière était bonne, et il sépara la lumière d’avec les ténèbres. Il donna à la lumière le nom de Jour, et aux ténèbres le nom de Nuit. Et du soir et du matin se fit le premier jour. » (Genèse I, 1-5).
[2] L.-C. de Saint-Martin, Des Erreurs et de la vérité, ou les hommes rappelés au Principe universel de la Science, Édimbourg, 1782.
[3] Les instructions destinées aux Élus Coëns, sont également une source fondamentale pour comprendre ce statut particulier accordé à « l’air » au sein du Régime écossais rectifié, ce qui le différencie nettement de la franc-maçonnerie désignée comme étant « apocryphe », car méconnaissant la doctrine de l’Ordre :
« D. Pourquoi n’admettez-vous que trois éléments ?
R. Parce que l’air n’en est point un réellement et qu’il émane totalement des autres sans lesquels il n’existerait pas plus que le corps sans son âme... »
(Cf. Catéchismes d’Apprenti, Compagnon et Maître, Fonds Z).